Acide valproïque – Grossesse
Date de mise à jour : 29.07.22
DEPAKINE® – DEPAKOTE® – DEPAMIDE® – MICROPAKINE®
L’acide valproïque ou valproate (DEPAKINE® – MICROPAKINE®) est utilisé dans le traitement de l’épilepsie.
Le divalproate de sodium (DEPAKOTE®) et le valpromide (DEPAMIDE®) sont utilisés dans les troubles bipolaires et se métabolisent tous les deux en acide valproïque.
Les données et la conduite à tenir présentées ci-dessous sont valables de façon identique pour ces différentes molécules qui seront regroupées sous l’appellation « acide valproïque ».
Décembre 2014
L’Agence européenne du médicament (EMA) a entériné un avis que le CRAT défend depuis 2004 : « Le valproate ne doit pas être prescrit aux filles, aux adolescentes, aux femmes en âge de procréer et aux femmes enceintes, sauf en cas d’inefficacité ou d’intolérance à toutes les autres alternatives médicamenteuses ».
Mai 2015
Renforcement des conditions de prescription et de délivrance (ANSM).
Juillet 2017 / Mai 2018
Des mesures de contre-indications successives ont été prises dans le domaine de la psychiatrie en France, puis dans l’épilepsie en Europe :
« Le divalproate de sodium (DEPAKOTE®) et le valpromide (DEPAMIDE®) sont désormais contre-indiqués chez les femmes enceintes et chez les femmes en âge de procréer n’utilisant pas une contraception efficace ».
« Dans l’épilepsie, le valproate est contre-indiqué pendant la grossesse sauf s’il n’existe pas d’alternative thérapeutique appropriée, et chez les femmes en âge de procréer sauf en cas d’inefficacité ou d’intolérance aux autres traitements et si toutes les conditions du programme de prévention de la grossesse sont respectées ».
ETAT DES CONNAISSANCES
- Aspect malformatif
- L’acide valproïque en monothérapie entraîne un syndrome polymalformatif dans près de 11% des cas en moyenne. Ce risque est significativement plus élevé que celui de tous les autres antiépileptiques ou thymorégulateurs, que celui des femmes épileptiques non traitées, et que celui de la population générale (environ 2% de malformations majeures à la naissance).
- En cas de polythérapie contenant de l’acide valproïque, le risque malformatif n’est pas sensiblement différent de celui qui existe en monothérapie d’acide valproïque.
- Effet-dose :
- Le risque malformatif est proportionnel à la dose d’acide valproïque
- Il n’y a pas de dose sans effet. Un risque malformatif existe même à faible posologie (≤ 650 mg/j)
- Malformations les plus fréquentes :
- cardiopathies
- anomalies de fermeture du tube neural (spina bifida essentiellement) dans 2 à 3% des cas (0,05% dans la population générale)
- hypospadias, malformations rénales
- malformations des membres (atteintes réductionnelles notamment préaxiales, ectromélies, arachnodactylies…)
- fentes palatines (+/- labiales)
- craniosténoses (notamment trigonocéphalies)
- dysmorphies faciales caractéristiques (philtrum long bombé, oreilles bas implantées, plis épicanthiques…)
- dans une moindre mesure : hyper laxité ligamentaire et anomalies de l’œil (myopie, troubles de réfraction, strabisme…)
- Période à risque pour certaines des malformations observées :
- anomalies de fermeture du tube neural : entre 4 et 6 semaines d’aménorrhée
- malformations cardiaques : entre 5 et 9 semaines d’aménorrhée
- La présence dans la fratrie d’un enfant déjà atteint d’une malformation liée à l’acide valproïque est un facteur de risque supplémentaire majeur de récidive.
- Aspect fœtal et néonatal
- L’acide valproïque passe le placenta : à terme, les concentrations néonatales sont équivalentes ou supérieures aux concentrations maternelles.
- Des thrombopénies et une diminution du fibrinogène ont été décrites dans quelques cas chez des nouveau-nés de mères traitées jusqu’à l’accouchement.
L’acide valproïque n’est pas inducteur enzymatique et ses effets indésirables sont indépendants de la vitamine K. - Quelques rares hypoglycémies ont été signalées dans la première semaine de vie chez des nouveau-nés de mères traitées jusqu’à l’accouchement.
- Aspect neurodéveloppemental
- Les enfants de mères traitées par acide valproïque pendant la grossesse ont un risque augmenté de troubles neurodéveloppementaux (dans les domaines cognitifs, comportementaux, moteurs) qui peuvent être mis en évidence parfois dès l’âge de 1 an et dont les points marquants sont indiqués ci-dessous :
- Troubles cognitifs (atteintes du QI, du langage, de l’attention et de la mémoire), difficultés d’apprentissage déficience intellectuelle :
- Le QI global des enfants exposés in utero est diminué d’environ 10 points
- Le QI verbal est particulièrement affecté avec une dizaine de points en moins sur un suivi jusqu’à l’âge de 10 ans environ, en mono ou polythérapie :
- 20 à 40% des enfants ont un QI verbal < 80
- Le recours au soutien scolaire et à la rééducation orthophonique est 2 à 6 fois plus fréquent chez ces enfants
- Effet dose :
- La fréquence et l’importance des atteintes est proportionnelle à la posologie d’acide valproïque
- Si pour une posologie supérieure à 750-800 mg/j le risque est important, il est également observé, mais dans une proportion moindre, à une posologie inférieure à 750-800 mg/j
- Troubles cognitifs (atteintes du QI, du langage, de l’attention et de la mémoire), difficultés d’apprentissage déficience intellectuelle :
- Les troubles autistiques et du spectre de l’autisme sont également 5 à 6 fois plus fréquents que dans les populations témoins.
- Les troubles du spectre de l’autisme concernent autant les filles que les garçons.
- Une augmentation du risque de troubles déficitaires de l’attention avec ou sans hyperactivité (TDAH) a également été mise en évidence : ce risque est multiplié par 1.5 par rapport à la population témoin non exposée. Il semble qu’il y ait une relation dose-effet.
- Ces atteintes neurodéveloppementales peuvent survenir en l’absence de malformation congénitale. En présence de malformations (dysmorphie faciale en particulier), le risque neurodéveloppemental est plus élevé.
- En cas d’exposition à l’acide valproïque en cours de grossesse, quelle que soit la durée de traitement et quelle que soit la période d’exposition, un suivi neurodéveloppemental de l’enfant est à prévoir dès le plus jeune âge (PNDS Embryo-foetopathie au valproate).
- Les enfants de mères traitées par acide valproïque pendant la grossesse ont un risque augmenté de troubles neurodéveloppementaux (dans les domaines cognitifs, comportementaux, moteurs) qui peuvent être mis en évidence parfois dès l’âge de 1 an et dont les points marquants sont indiqués ci-dessous :
- Aspect maternel
- L’acide valproïque peut être responsable chez l’adulte de troubles de l’hémostase sans rapport avec les facteurs vitamine K dépendants : thrombopénie, diminution du fibrinogène, allongement du temps de saignement.
EN PRATIQUE
L’acide valproïque a les effets tératogènes et neurodéveloppementaux les plus importants parmi les anticonvulsivants et les thymorégulateurs disponibles à ce jour. Toutes les mesures doivent être mises en œuvre pour éviter une grossesse sous acide valproïque. |
ACIDE VALPROÏQUE DANS L’EPILEPSIE
Il est important que l’épilepsie soit bien équilibrée tout au long de la grossesse. L’acide valproïque a les effets tératogènes et neurodéveloppementaux les plus importants parmi les anticonvulsivants disponibles à ce jour. Toutes les mesures doivent être mises en œuvre pour éviter une grossesse sous acide valproïque (cf. Etat des connaissances). |
- Prescription d’acide valproïque chez la femme en âge de procréer
- L’acide valproïque ne doit pas être utilisé chez les femmes en âge de procréer sauf en cas d’inefficacité ou d’intolérance aux alternatives médicamenteuses existantes. Pour les alternatives thérapeutiques : cf. Antiépileptiques – Grossesse.
- Si l’acide valproïque est prescrit (inefficacité ou intolérance aux alternatives médicamenteuses existantes) :
- L’utilisation d’une contraception efficace concomitante est indispensable
- S’assurer régulièrement de l’absence de grossesse pendant le traitement
- En prévision d’une grossesse / En préconceptionnel
- Une consultation préconceptionnelle est indispensable afin :
- De faire le point sur la pathologie et son traitement en vue d’une future grossesse
- D’informer la patiente des risques liés à l’acide valproïque (cf. Etat des connaissances).
- D’envisager l’arrêt de l’acide valproïque avant la conception et son relais par un autre antiépileptique. Pour les alternatives thérapeutiques : cf. Antiépileptiques – Grossesse.
- Un délai de 5 jours en moyenne est suffisant après l’arrêt de l’acide valproïque pour envisager une conception.
- Si, après avis du spécialiste, l’acide valproïque est indispensable car son interruption risque de compromettre gravement l’équilibre maternel et qu’il n’existe aucune alternative acceptable, la poursuite du traitement n’est envisageable que sous réserve du maintien de posologies les plus faibles possibles (cf. Etat des connaissances).
- En ce qui concerne la prescription d’acide folique chez les femmes épileptiques traitées : cf. Acide folique et prévention des malformations congénitales.
- Une consultation préconceptionnelle est indispensable afin :
- Découverte d’une grossesse pendant le traitement
- Ne pas arrêter le traitement sans un avis spécialisé.
- Compte tenu des risques de l’acide valproïque en cours de grossesse (cf. Etat des connaissances) :
- Informer la patiente des risques encourus
- Envisager de changer de traitement chez la femme enceinte quel que soit l’âge de la grossesse, sans compromettre gravement l’état clinique de la patiente
- Pour les alternatives thérapeutiques : cf. Antiépileptiques – Grossesse
- Ne maintenir l’acide valproïque qu’en dernier recours et à posologie la plus faible possible (cf. Etat des connaissances)
- En ce qui concerne la prescription d’acide folique chez les femmes épileptiques traitées : cf. Acide folique et prévention des malformations congénitales.
- En cas d’exposition à l’acide valproïque au 1er trimestre de la grossesse, la surveillance prénatale sera orientée sur le tube neural, le cœur, la face, la voute crânienne, les reins, les organes génitaux externes et le squelette (cf. Etat des connaissances).
- En cas d’exposition après le 1er trimestre, la surveillance prénatale sera orientée sur la voute crânienne.
- Si l’acide valproïque est poursuivi jusqu’à l’accouchement :
- Envisager un bilan d’hémostase chez la mère avant l’accouchement (plaquettes, fibrinogène, TCA, temps de saignement)
- Informer l’équipe de la maternité du traitement maternel pour lui permettre d’adapter l’accueil du nouveau-né (fibrinogène, plaquettes et glycémie) (cf. Etat des connaissances)
- Suivi de l’enfant à long terme :
- En raison des effets neurodéveloppementaux décrits chez les enfants exposés in utero à l’acide valproïque et ses dérivés, un suivi neurodéveloppemental précoce des enfants est souhaitable (PNDS Embryo-foetopathie au valproate).
- Traiter une femme enceinte
- Compte tenu des risques de l’acide valproïque en cours de grossesse, tout sera envisagé pour instaurer un autre anticonvulsivant chez la femme enceinte quel que soit l’âge de la grossesse, et sans compromettre gravement l’état clinique de la patiente. Pour les alternatives thérapeutiques : cf. Antiépileptiques – Grossesse.
- L’utilisation de l’acide valproïque ne sera envisagée qu’en dernier recours, à la plus faible posologie possible, et après avoir informé la patiente des effets décrits (cf. Etat des connaissances).
- Si un traitement par acide valproïque en cours de grossesse est indispensable : Contactez le CRAT.
ACIDE VALPROÏQUE / DIVALPROATE / VALPROMIDE DANS LES TROUBLES BIPOLAIRES
L’acide valproïque a les effets tératogènes et neurodéveloppementaux les plus importants parmi les anticonvulsivants et les thymorégulateurs disponibles à ce jour. Toutes les mesures doivent être mises en œuvre pour éviter une grossesse sous acide valproïque (cf. Etat des connaissances). |
- Prescription d’acide valproïque / divalproate / valpromide chez la femme en âge de procréer
- L’acide valproïque / divalproate / valpromide ne doit pas être utilisé chez les femmes bipolaires en âge de procréer. Pour les alternatives thérapeutiques : cf. Thymorégulateurs – Grossesse.
- Si l’acide valproïque / divalproate / valpromide est prescrit (inefficacité ou intolérance aux alternatives médicamenteuses existantes) :
- L’utilisation d’une contraception efficace concomitante est indispensable
- S’assurer régulièrement de l’absence de grossesse pendant le traitement
- En prévision d’une grossesse / En préconceptionnel
- Une consultation préconceptionnelle est indispensable.
- L’arrêt du traitement par acide valproïque / divalproate / valpromide devra être entrepris en accord avec le spécialiste avant la conception. Pour les alternatives thérapeutiques : cf. Thymorégulateurs – Grossesse.
- Un délai de 5 jours en moyenne est suffisant après l’arrêt de l’acide valproïque / divalproate / valpromide pour envisager une conception.
- Découverte d’une grossesse pendant le traitement
- Compte tenu des risques de l’acide valproïque / divalproate / valpromide chez la femme enceinte (cf. Etat des connaissances),:
- Informer la patiente des risques encourus
- Le traitement sera interrompu quel que soit le terme de la grossesse. Pour les alternatives thérapeutiques : cf. Thymorégulateurs – Grossesse
- En cas d’exposition à l’acide valproïque au 1er trimestre de la grossesse, la surveillance prénatale sera orientée sur le tube neural, le cœur, la face, la voûte crânienne, les reins, les organes génitaux externes et le squelette (cf. Etat des connaissances)
- En cas d’exposition après le 1er trimestre, la surveillance prénatale sera orientée sur la voûte crânienne.
- Si le traitement thymorégulateur a été suspendu en raison de la grossesse, il sera rétabli au plus tôt après l’accouchement aux posologies antérieures, du fait du risque de décompensation dans le post-partum, ce d’autant que l’allaitement est possible sous acide valproïque / divalproate / valpromide.
- Suivi de l’enfant à long terme :
- En raison des effets neurodéveloppementaux décrits chez les enfants exposés in utero à l’acide valproïque et ses dérivés, un suivi neurodéveloppemental précoce des enfants est souhaitable (PNDS Embryo-foetopathie au valproate).
- Compte tenu des risques de l’acide valproïque / divalproate / valpromide chez la femme enceinte (cf. Etat des connaissances),:
- Traiter une femme enceinte
- Compte tenu des risques en cours de grossesse (cf. Etat des connaissances), l’acide valproïque / divalproate / valpromide ne doit pas être utilisé, et ce quel que soit l’âge de la grossesse. Pour les alternatives thérapeutiques : cf. Thymorégulateurs – Grossesse.
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